De partout on l’aperçoit. S’il est un symbole monumental de Marrakech, c’est bien elle! Elle semble veiller sur la Place Jemaa El Fna, montrer le chemin de la Medina depuis la ville moderne de Gueliz, et s’affirmer comme point de repère où que l’on se trouve dans le dédale des rues de la Medina. Même depuis le hublot de l’avion, la Mosquée désigne la cité ocre.
Elle est un chef-d’œuvre de l’architecture religieuse de la dynastie Almohade, tout comme la Giralda de Séville qui s’en inspire largement. Son minaret, haut de 77 mètres, jusqu’à la pointe de la flèche, domine la ville. La Koutoubia combine grâce et rigueur dans son aspect. sa beauté s’impose sans ostentation.
Elle est encore aujourd’hui à la croisée des chemins, balisant ce carrefour de rencontres qu’est la Place Jemaa El Fna, ouvrant trois des côtés de son minaret vers des quartiers de la Medina, le quatrième regardant vers le nord et la ville moderne de Gueliz.

Avenue Mohamed V vers Gueliz
L’édifice actuel daterait de 1158 après la destruction d’une première mosquée au même endroit car son orientation vers la Mecque était erronée. Les souverains Almohades Abdelmoumen et Yacoub Al Mansour en furent les bâtisseurs. Son plan est en T.

Photo 1920
La mosquée compte seize nefs et sept travées. La salle de prières peut accueillir plus de 20 000 fidèles.
Le minaret (identique à celui de la Giralda de Séville) serait un peu plus tardif. Il est travaillé d’arcs entrelacés, de bandeaux de faïence blanche et turquoise composés de carrés et d’hexagones, d’ornements peints floraux. Les quatre faces sont différentes.

Minaret face nord et face ouest

Minaret face est et face sud
Le lanternon de 16 mètres de haut et la flèche de 7.50 m surmontent la première partie du minaret. Sur la flèche sont enfilées quatre sphères (trois visibles) et une sorte de poire pointue au sommet.
Certes, le touriste non musulman ne pourra pas visiter l’intérieur. Cette interdiction date de l’époque du Protectorat français. Le Maréchal Lyautey considérait que les européens devaient respecter davantage les sanctuaires.
Les jardins attenants et les vestiges de la première mosquée constituent néanmoins une belle promenade, permettant d’admirer les décorations extérieures taillées dans la pierre de Gueliz.
Sur le côté nord, le mihrab de la première mosquée est visible. Cette niche dans le mur de la mosquée indique la qibla, c’est à dire la direction de la Mecque. Celui-ci, mal orienté, aurait donc causé la destruction de ce premier édifice.

Mihrab côté nord
Le nom Koutoubia fait référence aux livres, aux libraires. En langue marocaine moderne (darija), le mot kteb signifie écrire, ktaab le livre, kouttab pour les écrivains. On peut y voir des références à l’écrit, aux écrits sacrés, aux hommes qui transcrivent, à la mémoire, à la culture, à la transmission. Ainsi, au- delà du lien purement spirituel, la Mosquée de la Koutoubia s’inscrit dans un mouvement plus universel encore. Elle est un lieu en osmose avec les trois mondes (que symbolisent parfois les sphères du lanternon), le monde céleste, le monde intermédiaire et le monde terrestre.
Autour de la Mosquée je jette un regard panoramique. Il peut s’arrêter sur les feuilles de palmiers, sur les cimes enneigées de l’Atlas, sur les remparts de terre ocre, sur des bouquets de roses, sur des vestiges de pierre renvoyant aux siècles passés, sur le bleu azur du ciel sans nuages, sur les rues et avenues encombrées de piétons, de motos, de voitures… Et certains soirs quand le croissant de lune s’en mêle…