Se perdre dans les souks
Inconcevable de séjourner à Marrakech sans succomber à la déambulation dans les allées pittoresques et foisonnantes des fameux souks. S’y perdre, c’est la loi du genre!
« Les souks sentent les épices, il y fait frais et ils ruissellent de couleurs… » écrivait Elias Canetti, prix Nobel de littérature, après sa visite de Marrakech en 1953.
L’atmosphère des souks telle qu’il la décrit dans son livre « Les voix de Marrakech » semble inchangée depuis cette époque.
Le « souk » c’est un tout simplement un « marché », appelé parfois “bazar”.
Dans la ville rouge, c’est derrière la légendaire Place Jemaa el Fna que le souk tisse sa toile.
Par les différentes entrées depuis la Place Jemaa El Fna, vous pourrez commencer vos pérégrinations. Les souks se sont aussi étendus dans certaines rues avoisinantes comme Riad Zitoun Jdid ou Riad Zitoun Kedim.
Ici le grand « marché » se déploie, parfois à ciel ouvert, le plus souvent au milieu d’un labyrinthe de venelles ombragées où les rais de lumière créent une atmosphère envoûtante.
Sens en éveil
Aller faire les souks ce n’est pas seulement partir marchander pour acheter tel ou tel objet.
Il s’agit plutôt d’une expérience totale et assez palpitante.
On peut dire que les cinq sens y trouvent leur compte. La débauche de marchandises, les accumulations de produits savamment présentées, les étals débordants constituent un spectacle hors normes.
Marchandage
Ouvrez donc grand vos yeux, vos narines, vos écoutilles et votre esprit. Gardez le sourire aux lèvres, ici c’est le passeport indispensable pour toute rencontre et négociation. Bien sûr, le marchandage est une règle mais c’est plutôt comme un jeu qu’il faut l’aborder. Elias Canetti : ” Personne ne connaît le prix à l’avance, pas même le marchand, car il y a dans tous les cas, de nombreux prix différents .Chacun d’eux se rapporte à une autre situation, à un autre acheteur, à un autre moment de la journée, à un autre jour de la semaine”
Parfois les choses ont le prix du moment passé ensemble et de la qualité de la relation établie.. A la fin, chacun sera satisfait de la transaction et pensera avoir gagné la partie!
Vos yeux écarquillés vont se voir offrir toute la gamme des couleurs existantes, vos narines dilatées vont humer d’irrésistibles parfums d’épices ou d’agrumes, vos oreilles entendront des sons et des bruits d’atelier inhabituels, et vous devrez affûter votre esprit pour le préparer au jeu subtil du marchandage.
Profusion… tout est à profusion !
On a trop souvent tendance à croire que les souks sont une création, un objet seulement touristique organisé dans un unique but marchand. Que nenni ! Ce n’est absolument pas le cas. Les souks existent depuis toujours, bien avant que les touristes ne les découvrent et ne les envahissent régulièrement et leur activité se déroule de la même façon sans eux.
Ainsi on peut voir de nombreuses familles locales venir de toute la médina y faire leurs emplettes. A côté des souvenirs touristiques, des objets artisanaux, tapis, mobilier antique, bijoux, céramiques, lanternes, tissus, cuirs, ils trouveront aussi le plus grand choix de marchandises du quotidien, vêtements, vaisselle, linge de maison, chaussures, foulards, ceintures, sacs…
A Marrakech, les souks sont divisés en différents secteurs selon les activités qui y sont regroupées.
Le souk du cuir, le souk du cuivre, le souk des teinturiers, de la laine, le souk des instruments de musique, le souk des ébénistes et menuisiers, le souk des tanneurs, le coin des forgerons et des dinandiers, le souk des babouches et celui des épices, des olives et citrons confits.
Il est intéressant d’évoluer entre les lieux de fabrication des objets et les lieux de vente qui se jouxtent.
L’art de montrer
On pourrait croire que les” bazaristes” marocains ont inventé l’art de l’accumulation. Des dispositions savantes, agencées de façon artistique, voisinent avec des présentations plus désordonnées. Les assemblages de couleurs ou de matières sont étudiés. Les alignements préparés chaque matin dès l’ouverture des boutiques. On offre à la vue du visiteur, promeneur et potentiel acheteur, des centaines d’objets mais les stocks cachés sont tout aussi remplis. Saturation, foisonnement, étourdissement.
Certaines zones commerçantes sont spectaculaires et bariolées pour attirer le chaland, d’autres, celles où l’on fabrique les objets, sont moins reluisantes mais tout aussi captivantes.
Convivialité
Il vous sera très facile de communiquer avec les artisans ou les marchands qui n’attendent que ça et il vous sera impossible de refuser le verre de thé à la menthe qui vous sera si gentiment offert. Les conversations vont bon train, chacun se raconte un peu : “Français, Espagnol, Italien, Anglais?” “Que tal, ça va bien, tutto bene, How are you today ?”
Une véritable Tour de Babel. S’il faut connaître quelques mots de japonais, de chinois ou de portugais, ou de breton comme “Kenavo“, pas de problèmes!
L’essentiel est d’échanger, de passer un petit moment ensemble, avec humour et petites blagues indispensables.
Et si l’on fait affaire, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes!